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Dirigeants Augmentés : Export en hausse malgré les taxes ? Le cas Croate + Décider seul : génie ou danger ?

Bonjour à tous,

Bienvenue dans Dirigeants Augmentés. Trois fois par semaine, je décortique pour vous, dirigeants de PME entre 1 et 50M€ de CA, les angles morts et les signaux faibles qui font la différence. Pas de langue de bois, pas de théorie fumeuse. Juste du concret, qui pique et qui fait réfléchir.

Aujourd'hui, on zoome sur deux fronts qui agitent vos nuits : la guerre commerciale qui rebat les cartes et ce satané isolement qui vous ronge de l'intérieur. D'un côté, certains subissent les droits de douane comme une fatalité. De l'autre, des économies qu'on n'attendait pas affichent une résilience à en faire pâlir plus d'un. Coïncidence ou stratégie ? On va gratter le vernis.

Puis, on plongera dans cette tour d'ivoire que vous connaissez si bien. Ce fameux "splendide isolement" du dirigeant. Est-ce vraiment un atout ou le plus sûr chemin vers la décision stérile ?

Deux sujets, un même fil rouge : comment transformer la contrainte en levier, et l'isolement en force collective.

Accrochez-vous, ça va secouer vos certitudes.

Guerre commerciale : L'Europe centrale, ce canari qui chante au lieu de suffoquer ?

Aujourd'hui, on va parler d'un sujet qui crispe : la guerre commerciale et ses joyeusetés. Le narratif habituel ? Catastrophe, repli, tout fout le camp. Et si, pour une fois, on regardait ailleurs ? Si on observait ceux qui, dans ce grand chambardement, ne se contentent pas de subir mais transforment la menace en opportunité ? Oui, vous avez bien lu.

Le monde à l'envers ?

On nous bassine avec les droits de douane punitifs, notamment les 25% sur l'automobile européenne imposés par les États-Unis. On s'attendrait à un effondrement, surtout pour des économies ultra-dépendantes de l'export, comme la Slovaquie qui exportait jusqu'à 82,2% de son PIB en 2024. Le secteur automobile, particulièrement visé, devrait être à l'agonie. Logique, non ?

Sauf que. Pendant que certains ici analysent la couleur du précipice, d'autres en Europe Centrale affichent une résilience insolente. La Croatie ? Ses exportations automobiles ont bondi de 281% en valeur depuis novembre dernier, comparé à la moyenne des quarante mois précédents. La Slovénie ? +55% sur la même période pour le secteur auto. Leurs nouveaux meilleurs clients ? Le Canada, la Chine, le Mexique. Tiens, tiens... des pays souvent dans le viseur des politiques commerciales américaines. Un hasard ? J'en doute.

Les ingrédients du "miracle"

Alors, potion magique ou stratégie délibérée ? Un peu des deux. Cette performance ne sort pas d'un chapeau. Elle s'appuie sur des fondamentaux solides et une capacité d'adaptation qui devrait en inspirer plus d'un.

D'abord, une consommation intérieure qui tient la route, soutenue parfois, comme en Pologne ou en République Tchèque, par des baisses de taux directeurs rendues possibles par l'appréciation de leurs devises face au dollar. Malin.

Ensuite, une montée en gamme industrielle progressive. Ces pays ne sont plus les ateliers low-cost d'hier. La main-d'œuvre est qualifiée, positionnée sur le milieu et haut de gamme. Ça attire les investissements directs étrangers : un stock de 857 milliards de dollars en 2023 pour cinq de ces pays.

Et puis, il y a ce fameux phénomène de relocalisation, ou "nearshoring". Face aux tensions sino-américaines, 40% des entreprises cherchant à délocaliser leur production ont trouvé de nouvelles terres d'accueil. La Pologne, par exemple, est citée pour sa proximité géographique et sa stabilité politique. Les nouvelles chaînes de production, notamment dans la transition électrique, y trouvent un terreau fertile.

N'oublions pas le rôle de l'Allemagne, qui absorbe plus de 30% des exportations de la région. Même si la locomotive allemande tousse un peu à cause des droits de douane, ses liens avec l'Europe Centrale agissent comme un amortisseur. Et certains prévoient même que le plan de défense et d'infrastructures allemand pourrait, à terme, doper encore plus ces économies.

Et vous, pendant ce temps ?

Cette dynamique en Europe Centrale n'est pas anecdotique. Elle pose des questions fondamentales pour chaque dirigeant de PME industrielle en France.

  • Votre chaîne de valeur est-elle un roc immuable ou un mécano agile ? La reconfiguration des flux mondiaux est une réalité. Subir ou anticiper, il faut choisir.

  • La montée en gamme, c'est pour quand ? Compétitivité rime de moins en moins avec coût et de plus en plus avec valeur ajoutée.

  • Vos marchés exports sont-ils gravés dans le marbre ? L'exemple croate ou slovène montre que de nouvelles routes commerciales s'ouvrent quand d'autres se ferment.

  • L'incertitude est là. Durable. La question n'est plus de savoir quand elle finira, mais comment votre entreprise apprend à danser sous l'orage, voire à en tirer parti.

Ce n'est pas une question de copier-coller un modèle. C'est une invitation à challenger vos certitudes, à regarder ce "grand jeu" mondial avec des lunettes neuves. Parce que dans un monde où les cartes sont constamment rebattues, l'attentisme est le plus sûr chemin vers l'insignifiance.

La résilience de l'Europe Centrale face aux tsunamis commerciaux n'est pas un coup de poker. C'est le fruit d'une agilité, d'une capacité à pivoter, à voir le monde différemment. Une intelligence collective à l'échelle d'écosystèmes entiers.

Et c'est précisément là qu'on touche au cœur du problème pour beaucoup d'entre vous.

Cette capacité à s'adapter, à innover, à décider vite et bien... elle est souvent mise à mal par un facteur trop souvent sous-estimé : la solitude.

Ce poids sur vos épaules, cette impression de porter seul le fardeau des décisions stratégiques, cette difficulté à trouver des sparring partners à votre hauteur.

Si la reconfiguration des chaînes de valeur mondiales vous force à repenser vos modèles...

... que dire alors de la nécessité de reconfigurer votre propre "chaîne de décision" interne ?

Passons maintenant de la macro à votre micro. Du grand jeu mondial à votre tour d'ivoire.

Votre tour d'ivoire : palace ou prison ? L'antidote à la solitude du dirigeant

Vous vous sentez seul aux commandes ? Bienvenue au club. Ce club très select des dirigeants qui portent le monde sur leurs épaules, jonglent avec l'incertitude et la complexité croissante des marchés, tout en devant prendre des décisions qui engagent l'avenir de leur boîte et de leurs équipes. Classique.

La petite musique qu'on vous sert depuis des années ? Le leader visionnaire, ce génie solitaire qui, du haut de sa tour d'ivoire, a des éclairs de lucidité que le commun des mortels ne peut qu'admirer. Bullshit. Votre tour d'ivoire, neuf fois sur dix, c'est votre cage dorée. Un isoloir confortable où mijotent les doutes, les angoisses de la page blanche stratégique, et la peur, bien réelle, de se planter magistralement.

Le piège de l'expérience solo

Pierre Durand, le DG de PME typique que je vois souvent, il connaît ça par cœur. 52 ans, une PME industrielle qui tourne, mais un sentiment persistant d'isolement. Son indépendance, il y tient. Mais à quel prix ? Celui de décisions prises en solo, souvent lentes, parfois frileuses, face à des transformations qui n'attendent pas. Il redoute d'exposer ses vulnérabilités, de peur de perdre son autorité. Résultat : des échanges informels avec des pairs qui restent en surface, beaucoup de small talk, peu de substance. Une perte de temps, souvent.

Le paradoxe, c'est que plus on monte, plus on est seul, et plus on a besoin d'un regard extérieur affûté. Pas celui des consultants qui vous vendent des PowerPoints standardisés, ni celui des potes qui vous tapent dans le dos. Non, un regard de pairs qui vivent les mêmes emmerdes, les mêmes pressions économiques, le même désalignement organisationnel parfois.

L'intelligence collective, c'est pas de la magie, c'est de la mécanique

L'idée reçue ? Mettez dix cerveaux brillants dans une pièce, et la lumière jaillira. Faux. Ce qui compte, ce n'est pas la somme des QI individuels, mais la qualité de l'interaction. L'écoute active, la capacité à challenger sans ego, la diversité des profils et des sensibilités. Des études le prouvent : la "sensibilité sociale" d'un groupe est un meilleur prédicteur de sa performance collective que le QI moyen de ses membres. Traduction : des gens qui savent vraiment écouter et capter les signaux faibles, même à distance, ça explose les scores.

C'est là que le bât blesse avec les clubs de dirigeants classiques. On y vient pour le réseau, on y reste par habitude, mais on en repart rarement avec des plans d'action concrets ou une clarté nouvelle. Zéro accountability. Du vent.

Le vrai mastermind : antidote à la superficialité

Un vrai collectif structuré, un mastermind si vous préférez ce terme un peu galvaudé, c'est l'exact opposé. On ne parle pas ici de brainstormings mous du genou ou de déjeuners mondains. On parle d'un cadre. Strict. Confidentiel. Où chaque membre passe sur le "hot seat", expose ses tripes, ses vrais problèmes – pas ses succès de façade. Et où les autres ne sont pas là pour caresser dans le sens du poil, mais pour questionner, déconstruire, apporter des perspectives que vous n'auriez jamais envisagées seul.

La trouille de Pierre Durand ? La peur du jugement, de l'exposition. Justement. La confidentialité absolue d'un tel groupe, couplée à une sélection rigoureuse des membres (7 au maximum, pour garantir la profondeur), c'est ce qui permet de déposer les armes, de parler vrai. Et la visio, me direz-vous ? Aucun frein si la structure est en béton : ordre du jour précis, tours de parole, suivi systématique des engagements. La progression n'est plus linéaire, elle devient exponentielle. Chaque session apporte un déclic, une décision, un plan d'action. Fini de tourner en rond.

Arrêtez de croire que votre expérience individuelle, aussi riche soit-elle, suffit à tout décoder. La solitude du dirigeant n'est plus un avantage compétitif, mais un handicap majeur dans un monde qui exige agilité et intelligence collective.

Du canari à la tour d'ivoire : la partie ne fait que commencer

Alors, on récapitule. D'un côté, des économies qui prouvent que la guerre commerciale n'est pas une sentence de mort. L'agilité, la diversification, la montée en gamme : des leçons à méditer. De l'autre, cette solitude du dirigeant. Ce piège confortable qui freine vos décisions et atrophie votre vision stratégique. L'intelligence collective structurée n'est plus une option "nice to have". C'est une arme.

Ces deux réalités, aussi différentes soient-elles, pointent vers une même urgence : l'obligation de challenger vos modèles. De ne plus subir. De penser différemment.

Justement, dans la prochaine édition, on va plonger dans le concret. Comment une jeune pousse, Social Playground, peut-elle "augmenter" son modèle économique au-delà de la simple création de contenu social media ? J'ai identifié 3 patterns innovants pour eux : malins, à faible coût, forte valeur perçue, et déployables rapidement. Des pistes pour enrichir offre ET revenus sans tout péter. Des leçons transversales pour votre propre business, même s'il est aux antipodes du social media.

Ne ratez pas ça. C'est lundi prochain et ça pourrait bien vous donner quelques idées décapantes pour vos propres chantiers. L'info qui fait la différence n'attend pas.

Si cette édition vous a bousculé, tant mieux. Le but n'est pas de plaire, mais de servir. Partagez-la avec un autre dirigeant qui, selon vous, mérite d'être secoué.

C'est tout pour aujourd'hui. Eric