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Dirigeants Augmentés : Système contre soi : comment décider juste quand tout est faux ?
Bonjour à tous,
Bienvenue dans votre briefing stratégique. Chaque semaine, nous décryptons les forces qui pèsent sur vos décisions. Loin du bruit médiatique, au cœur de votre réalité de dirigeant.
Aujourd'hui, nous regardons la vérité en face. Celle d'un dirigeant de PME industrielle pris en tenaille.
D'un côté, un système français qui freine, qui taxe, qui complexifie. Une arène économique et normative où se battre relève de l'héroïsme quotidien. Nous analyserons le plan de bataille proposé par vos pairs du METI, un véritable cri d'alarme.
De l'autre, une croyance tenace, presque un dogme : celle que le chef doit décider seul. Une posture qui vous isole et, comme nous le verrons, constitue une erreur stratégique majeure.
Car le plus grand danger n'est peut-être pas la lourdeur du système.
C'est la manière dont vous choisissez d'y faire face.

Le coup de gueule des ETI : rustines ou vraies solutions ?
Aujourd'hui, on décortique le cri du cœur du Mouvement des ETI. Un rapport qui pose 15 mesures pour relancer l'industrie.
Un plan de bataille. Ou un dernier plaidoyer avant le "point de bascule définitif", comme le craint son coprésident.
Vous sentez cette pression ? Cette incertitude qui paralyse la décision ?
Vous n'êtes pas seul.
Plongeons dans le concret.
1. La mort par mille coupures normatives
Le chiffre est brutal.
+653% de normes environnementales depuis 2002.
On ne parle plus de régulation. On parle d'asphyxie.
Cette "inflation normative", comme ils l'appellent, est le mal qui ronge votre capacité d'agir. Chaque nouvelle règle est une charge mentale, un coût, un délai. Un frein de plus quand vos concurrents, eux, accélèrent.
Le METI propose un "moratoire normatif sur deux ans".
Une pause.
Est-ce une solution ou une simple rustine ? Une trêve avant le retour de la vague ?
La question n'est pas de stopper les normes. La question est de retrouver du bon sens.
Et vous, combien de projets avez-vous abandonnés à cause de cette complexité administrative ?
2. Le terrain : sanctuariser ou disparaître
L'industrie a besoin d'espace.
Le rapport appelle à "sanctuariser juridiquement 25.000 hectares de fonciers industriels".
C'est une mesure de survie.
Car pendant que l'on débat, le foncier disparaît, se complexifie, devient inaccessible. Une PME qui veut s'agrandir aujourd'hui fait face à un parcours du combattant. On lui parle de "zéro artificialisation nette" pendant qu'on importe des produits fabriqués sur des terres gagnées sans état d'âme.
Le paradoxe est total.
Le fonds de 900 millions d'euros par an pour les projets territoriaux est une bonne idée. Sur le papier.
Mais sera-t-il un accélérateur agile ou une nouvelle usine à gaz administrative ?
La vraie question est là.
3. Le coût du réel : quand les chiffres ne mentent pas
Finissons avec le nerf de la guerre. Le P&L.
Deux chiffres de l'article tuent le match.
Coût horaire du travail industriel en France : 46,36 euros.
Le plus élevé d'Europe.
Déficit commercial manufacturier : entre 50 et 100 milliards d'euros par an.
Le lien de cause à effet est d'une simplicité biblique.
Nous avons un talent incroyable, des ingénieurs brillants, mais nous les payons au prix du luxe pour produire des biens qui doivent se battre sur le marché mondial.
Le METI propose une loi de programmation pour la compétitivité, pour s'aligner sur les standards européens. Pas pour devenir un paradis low-cost. Juste pour être dans le match.
Et que dire de l'électricité ? Notre parc nucléaire devrait être un atout stratégique majeur, nous offrant une énergie décarbonée et compétitive. Est-ce vraiment le cas aujourd'hui dans vos factures ?
Le rapport évoque un "volontarisme qui s'émousse".
Je parlerais plutôt d'une lucidité qui s'impose.
Les dirigeants d'ETI ne sont pas fatigués de se battre. Ils sont fatigués de se battre avec un boulet attaché à chaque cheville.
Ces 15 mesures ne sont pas une liste de souhaits.
C'est une alarme incendie.
Il est peut-être temps de l'entendre.
Le constat est donc sans appel. Le dirigeant d'ETI se bat dans une arène où les règles semblent écrites pour le faire trébucher. "Inflation normative", coût du travail prohibitif, concurrence internationale déloyale... Le rapport du METI dresse le portrait d'un gladiateur valeureux mais épuisé de se battre avec des boulets aux pieds.
Face à cette pression externe, une seule question compte : quelle est VOTRE stratégie pour décider plus vite et plus juste que les autres ?
Comment naviguez-vous dans ce brouillard permanent ?
La réponse par défaut, trop souvent, est le repli. L'isolement. La conviction que votre expérience et votre intelligence suffiront.
Pourtant, c'est précisément dans cette solitude que se niche le plus grand risque.
Et si votre principal handicap n'était pas le coût du travail, mais votre propre isolement ?

La solitude du dirigeant : la plus grande de vos erreurs stratégiques
Ici, on déconstruit les mythes du leadership pour aller à l'essentiel. Aujourd'hui, on s'attaque au plus grand tabou du pouvoir.
La solitude.
Cette posture que l'on vous vend comme une preuve de force, de contrôle. Cette tour d'ivoire dans laquelle vous prenez, seul, des décisions qui engagent l'avenir de votre entreprise, de vos équipes, de votre famille.
La vérité ?
Cette solitude n'est pas un avantage compétitif. C'est un handicap mortel.
Croire que votre intelligence individuelle suffit est la plus grande et la plus dangereuse des illusions.
1. Le mythe du dirigeant seul : une erreur statistique
L'histoire du bœuf de Francis Galton est sans pitié pour l'ego.
La moyenne des estimations du poids de l'animal par une foule s'est révélée plus juste que 99% des estimations individuelles, y compris celles des experts.
Pourquoi ? Parce que les erreurs, les biais, les angles morts de chacun s'annulent.
Ne reste que le signal pur.
Le dirigeant seul est celui qui parie son entreprise sur son unique estimation.
Une estimation statistiquement vouée à l'erreur.
2. Le piège des clubs de dirigeants : l'illusion du collectif
Je vous vois venir. Vous avez raison de vous méfier des clubs de dirigeants traditionnels.
Ces dîners où l'on vient pour se rassurer entre soi, pas pour être challengé. On y partage les succès, rarement les vrais doutes.
C'est ce que le sociologue Gustave Le Bon appelait une "foule psychologique" : un agrégat de conformisme où l'on accumule la médiocrité, pas l'intelligence.
Un mastermind structuré, c'est l'exact opposé.
C'est une "foule" de Galton, organisée pour la friction. Pour la confrontation des points de vue. On n'y vient pas chercher des gens qui vous ressemblent. On y vient chercher ceux qui voient ce que vous ne voyez pas.
3. La vraie puissance : le théorème de la diversité
La science est formelle. Le théorème de la diversité de Scott Page le prouve : l'erreur d'un groupe est égale à l'erreur moyenne de ses membres, MOINS la diversité des avis.
Pour améliorer la décision, vous avez deux leviers interchangeables : augmenter l'expertise (rare et chère) ou augmenter la diversité.
Une équipe de 7 personnes d'horizons différents battra systématiquement un expert seul, aussi brillant soit-il. La diversité des perspectives compense, et souvent surpasse, le manque d'expérience sur un sujet précis.
L'ennemi de la performance n'est pas l'incompétence. C'est l'ego de l'expert qui refuse d'écouter.
4. La mécanique de la performance : plus que de la conversation
Un vrai mastermind n'est pas une réunionite de plus.
C'est une mécanique de précision conçue pour démultiplier l'intelligence.
Le format est chirurgical. La confidentialité est absolue, non négociable. C'est la condition pour que chaque membre ose exprimer une idée disruptive sans craindre le jugement.
Le "hot seat" n'est pas une discussion. C'est un mécanisme d'agrégation où le groupe entier se concentre sur VOTRE problème pour converger vers un plan d'action. On ne parle pas des problèmes. On trouve ce qu'il faut FAIRE.
Et la responsabilisation (l'accountability) est la clé de voûte. Le groupe vous tient responsable, non pas de suivre ses conseils, mais d'exécuter ce que VOUS avez décidé après l'avoir entendu.
C'est l'antidote parfait à la solitude du pouvoir.
Arrêtez de vouloir tout résoudre seul. C'est mathématiquement la pire stratégie. Vous n'avez pas besoin de plus d'informations. Vous avez besoin de plus de perspectives.
L'investissement n'est pas le temps ou l'argent. C'est la volonté de confronter votre modèle mental pour réduire votre marge d'erreur systémique.
Le résultat ? Vous avancez plus en 3 mois qu'en 12 mois seul.
Parce que vous arrêtez de tourner en rond dans vos propres certitudes.
Système contre soi : la sortie par le haut
Le diagnostic est posé. D'un côté, un environnement systémique qui pénalise l'activité industrielle en France. De l'autre, le piège de la solitude qui affaiblit votre jugement stratégique. Vous ne pouvez pas changer le premier en un jour, mais vous pouvez radicalement transformer le second.
La performance ne viendra pas d'un sursaut d'héroïsme individuel, mais de votre capacité à organiser l'intelligence collective autour de vous. Cesser d'être la seule source de décision pour devenir l'architecte des meilleures perspectives.
Osez partager cette analyse avec un pair qui se croit encore seul au sommet. Il vous en sera reconnaissant.
C'est tout pour aujourd'hui.
Eric